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Vue de Rabat, la victoire du Front national laisse un goût amer au personnel politique. «Je respecte le vote du peuple français. Mais cela ne veut pas dire que j’en suis heureux !», s’exclame Khalid Naciri, membre du bureau politique du PPS.
Et pour cause ! Au niveau national, cette formation politique arrive en tête avec 29,5% des voix devant les Républicains à 27% puis le PS et leurs alliés à 23%. Le tour de force du parti de Marine Le Pen est réussi : le FN est en tête dans 6 régions.
De ce côté-ci de la Méditerranée, on s’attendait à de tels résultats. Mais difficile de s’y habituer et, surtout, de s’en faire une raison. «Ce n’est pas vraiment une surprise. Ce qui n’empêche pas la consternation», soupire le jeune édile socialiste Tarik El Malki.
Comment expliquer une telle montée en puissance de ce parti de l’extrême droite ? Comment analyser le vote des électeurs de l’Hexagone ? Et quelle lecture faut-il en faire depuis le Maroc ? La réponse de Fatiha Layadi, députée du Parti authenticité et modernité, est sans équivoque. La victoire du Front national, explique-t-elle, s’inscrit dans la montée des nationalismes un peu partout en Europe. «Des nationalismes qui s’appuient sur le rejet de l’Autre et qui ont été alimentés cet été par les vagues de réfugiés. Les attentats du 13 novembre ont certainement contribué à cette victoire. Sauf qu’on a tendance à oublier qu’aux dernières élections européennes, 25 eurodéputés ont été élus sous les couleurs du FN. Ce parti est en progression constante», fait remarquer celle qui fait souvent le déplacement à Strasbourg en tant que membre de la commission mixte parlementaire Maroc/Union européenne.
Ceux et celles qui ont voté FN dimanche 6 décembre ont fait preuve d’une réaction insuffisamment mûrie face aux interpellations sécuritaires qui ont joué ces dernières semaines. Tel est le point de vue de l’ancien ministre de la Communication, Khalid Naciri, qui pointe un doigt accusateur sur « ces forces politiques rivalisant de dextérité pour savoir qui sera le champion du sécuritaire».
La mauvaise gestion de
la question religieuse
La percée du FN est bel et bien une réalité aussi bien politique que sociologique. C’est un choc pour la gauche, la droite mais aussi l'opinion publique. Dans les deux régions phares, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Nord-pas-de-Calais-Picardie, Marion Maréchal Le Pen et Marine Le Pen sont loin devant leurs concurrents.
Pour l’Usfpéiste Tarik El Malki, la montée de l’extrême droite menée par Marine Le Pen pose au moins quatre questions de fond. «D’abord l’insertion des jeunes et en particulier ceux issus de la migration. Il y a là un échec politique dans la lutte contre le chômage, le déploiement de la politique de la ville. L’Etat a démissionné des territoires. Et cela n’est pas venu avec le gouvernement Hollande », explique celui qui est économiste dans la vie normale. Deuxième facteur de fond soulevé par Tarik El Malki, la mauvaise gestion de la question religieuse. La création du Conseil consultatif de l’islam de France par Nicolas Sarkozy est, selon lui, «une véritable imposture». «Sur le front de la religion, la France a eu une politique d’amateur, presque insouciante». La crise économique a fait le reste, et surtout le lit du discours porté par l’extrême droite. «Sans oublier le rôle équivoque et malsain joué par les médias français qui entretiennent un climat de peur et des amalgames entre terrorisme, islam, insécurité », soutient l’élu municipal usfpéiste qui n’en finit pas de se poser la question de savoir si finalement «la gauche est faite pour gouverner tant elle est porteuse d’espérances beaucoup trop nombreuses».
La haine de l’Autre, ici et là-bas
Dimanche prochain, les Français retourneront aux urnes pour un deuxième tour des régionales et auquel le Parti socialiste a appelé à faire barrage au Front national alors que les républicains restent sur leur position du «ni-ni», autrement dit ni Parti socialiste ni Front national. Depuis Rabat, les inquiétudes du personnel politique se font de plus en plus audibles. «La victoire du FN ne peut que nous interpeller sur le plan sécuritaire mais aussi politique. Avoir des interlocuteurs d’obédience extrême droite est une situation plutôt inhabituelle pour le Maroc. Cela risque de créer des tensions», affirme K. Naciri dont le cœur continue de battre à gauche.
Des tensions peuvent surgir d’autant que la communauté marocaine installée en France est aux premières lignes. Pour Tarik El Malki, les populations maghrébines seront les premières victimes du Front national. Entre la préférence nationale en matière d’emploi, les coupes dans les allocations et les expulsions, ces populations seront très exposées.
C’est la même appréhension que l’on retrouve chez Fatiha Layadi pour qui les zones de turbulence ne sont pas à exclure pour la communauté marocaine. «Quant aux relations entre les deux pays, le FN rejoint certains de chez nous qui jouent eux aussi sur la haine de l’Autre», conclut-elle un brin perfide.